Le cercle, comme la
sphère, symbolise la forme parfaite, la totalité, la divinité, mais aussi le
Soi pour Young ( Soi à ne pas confondre avec l’égo ou le moi).
On peut imaginer le cercle comme formé de points juxtaposés. A partir
de chacun de ces points partirait un rayon et tous les rayons se rejoindraient
en un seul point situé au centre du cercle. Nous pouvons aussi dessiner des
cercles superposés allant du plus grand au plus petit, lequel ne serait visible
que sous forme de point.
Ainsi posé, le point ou joint central représente l’unité
fondamentale qui résume et concentre en lui seul les rayons et la sphère. Ce point nodal
symbolise la gnose, la connaissance ésotérique, dont les manifestations, objet
des savoirs exotériques sont ici représentés par les rayons issus de la sphère
et la sphère elle-même. La manifesté ou savoir exotérique, c’est le monde
de la forme, de la réalité, du temporel, du visible par opposition au monde de
l’informel, de l’intemporel, de l’invisible. Est-ce pour
autant que ces deux mondes sont étrangers l’un à l’autre ?. Pas du tout. Le manifesté surgit en quelque sorte de ce
foyer central, de même que les rayons issus de tous les points circulaires du
cosmos convergent vers lui et se résument ou se consument en lui.
Le foyer évoque l’âtre, le feu et bien sûr le soleil, source de
vie et de vérité, sur lequel je reviendrai, tellement son rayonnement
symbolique est puissant.
Le cercle, les rayons et le point central axial, nous les retrouvons
dans la roue, laquelle symbolise aussi par son mouvement les cycles vitaux et
cosmiques, la vie comme perpétuelle résurrection cyclique.
Dans les nombres, le zéro, qui n’en est pas un et qui est dessiné
sous forme de cercle est essentiel et incontournable, comme référence infinie
de tout chiffre.
Maintenant regardez ce petit dessin étudié pour provoquer une illusion d’optique.
C’est un de mes patients qui me l’a donné. Je l’utilise ici
pour illustrer mon propos.
Ce schéma représente deux cercles et un point central. En le
rapprochant et en l’éloignant de façon itérative de votre regard, tout en
gardant votre regard fixé sur le point central, vous remarquez deux
choses : l’immuabilité, la permanence dans l’unité du temps et
de l’espace du point central, tendis que l’un des deux cercles
tourne. Ainsi est la vie : le cercle qui tourne représente le mouvement
perpétuel des transformations cycliques, tandis que le point central représente
le noyau divin de l’être, l’invisible du visible, le secret ou
noyau ésotérique caché des réalités perçues et des savoirs exotériques.
Si le cercle représente la perfection, l’unicité centrale, le
carré représente la matière, la terre par rapport à la voûte céleste figurée
par le cercle, ( à noter que voûtes, coupole rosaces sont retrouvés dans
l’architecture de la plupart des lieux de culte), le sol par rapport au
soleil.
Dans beaucoup de mythes des origines, l’homme était en quelque
sorte un être parfait, uni dans l’Un, tel l’Adam de la genèse dans le jardin circulaire d’Eden. Après la chute, Adam
entre dans le monde de la dualité.
Le carré est, en quelque sorte la forme imparfaite du cercle, la
condition terrestre de l’homme non ressuscité. L’homme, depuis la
chute adamique, est en quête de perfection, en quête de retrouvailles, en quête
de son unicité perdue ; d’où son effort, à partir du carré,
d’accéder au cercle, soit la quadrature du cercle. Dieu, se faisant Homme
en Jésus Christ (à noter qu’en hébreu, Jésus signifie Homme), introduit
en quelque sorte le carré terrestre à l’intérieur du cercle céleste ou
divin et par sa mort-résurrection il ouvre la voie de la retrouvaille, du
retour à l’Adam de l’éden qu’il réactualise, bouclant ainsi
un cycle. Il y parvient par le passage de la croix sur laquelle je reviendrai
tout à l’heure.
Le soleil est habituellement
représenté par une sphère, une boule de feu à partir de laquelle se répand
lumière et chaleur sous la forme de rayons lumineux. Le carré terrestre est
touché, illuminé par cette sphère lumineuse, dont les rayons pénètrent chaque
zone d’obscurité et l’ouvrent à une forme perceptible et visible.
La mort-résurrection du Christ passe par la
croix, accomplissant le cycle du retour à l’Unité ou unicité primordiale.
Ce cycle suit les étapes suivantes :
Cercle (Le Verbe créateur) à
le carré (l’incarnation divine ou Verbe fait chair) à la croix (mise à mort)
à Cercle (le corps
transfiguré)
Nous pouvons maintenant représenter ce cycle sous la forme d’un
schéma dans lequel s’intègrent la croix, le carré et le cercle :
Nous remarquons que la croix rayonne à partir de la conjonction du
cercle et des quatre points des quatre angles du carré (qui, soit dit en passant
représentent aussi les quatre points cardinaux). Nous remarquons également que
l’intersection des deux branches de la croix correspondent exactement au
centre ponctuel du cercle, qui symbolise le centre d’Unité ésotérique de
l’Etre, point de connaissance de toute chose, alpha et oméga, début et
fin de tous les cycles.
Je ne vous étonnerai pas en vous disant que nous retrouvons tous ces
symboles dans notre Loge, dont les tenues et le rituel à travers les outils,
métaux etc, sont conçus pour nous aider dans notre
quête d’absolu, dans notre effort de retour à l’unicité, selon
cette lente élévation du carré terrestre vers la sphère céleste à la recherche
de l’Eden perdu, au dépassement de
la dualité et à la fusion dans l’un mystique.
Le tapis de Loge représente à plat le tracé du temple et de ses
symboles sur fond de pavé mosaïque. Le pavé mosaïque symbolise la dualité, cest-à-dire notre condition humaine. L’effort pour la
transcender nous amène à nous positionner subjectivement sur la ligne de
jonction entre le blanc, symbole de la pureté la plus parfaite et le noir,
symbole de la matière obscure. Tout au long de la tenue des travaux,
c’est à cet endroit que nous essayons de nous tenir, dans une tentative
d’intégrer et d’assumer en nous les contraires, la lumière et
l’obscurité, le bien et le mal , le masculin et
le féminin, le yang et le yin pour les hindouistes, l’animus et
l’anima de Jung.
Le soleil, sphère lumineuse, éclaire toute chose dans
Dans la loge, nous voyons également la voûte céleste, cercle ouvrant le
sommet du temple sur l’infini du cosmos.
Avant la fermeture de la loge, nous formons un cercle autour de la
représentation tracée du temple, la chaîne d’union, qui est une tentative
comme son nom l’indique de nous dégager des contraires, de la dualité
pour nous fondre dans l’Unité primordiale. C’est une tentative de
retour collectif au Verbe Créateur de toute chose, une tentative de retrouver
A mon sens, il serait faux de penser que la chaîne d’union
viserait l’abrasion de nos différences pour former un corps uni dans une
cause commune, serait-ce la fraternité. Si c’était cela, ce serait
l’exaltation d’une idéologie, comme celle d’un parti (pris)
et çà n’aurait plus rien à voir avec l’union mystique, la communion
au corps du Christ, symbole de la conjonction du Corps céleste et du corps
terrestre, du Verbe et de la chair, de l’esprit et du corps, les deux
déjà unis au cœur de l’être comme peuvent l’être le corps et
l’âme.
Un autre modèle de la conjonction du carré et du cercle, c’est le
corps humain lui-même. En effet, la tête dessine une sphère ou, vu en coupe, un
cercle sur le tronc en forme de carré. Le tronc reçoit des messages du cerveau
situé dans la tête et lui en envoie.
Et que dire de l’œuf fœtal dont chacun de nous est
issu. Le fœtus ne connaît pas la dualité. Il n’est pas séparé de sa
mère. Plus tard, le bébé ou le petit enfant, s’il n’arrive pas à
renoncer à cette union première à la mère, vivra, parfois toute sa vie, dans la
nostalgie de ce « paradis perdu ». En lieu et place de la quête
spirituelle, il recherchera la régression névrotique, la fuite illusoire dans
le sommeil ou les « paradis artificiels » que procurent certaines
drogues ou illusions. C’est dans une position fœtale qu’il
traversera la vie. Refusant d’entrer dans le mouvement cyclique de la
vie, il connaîtra la peur de mourir, la peur de l’étranger et de
l’inconnu, la peur de toute séparation.
Bernard DOULET, janvier 2002